samedi 18 février 2017

ABATTOIRS. ON N'A PAS LE DROIT DE COMBINER LES MAUX DE L'ÂGE ATOMIQUE AVEC LA SAUVAGERIE DE L'ÂGE DE PIERRE !



https://drive.google.com/open?id=0Bzp8y58gwcB3TlZ2SlhIak9qTWM
CLIQUER DANS L'IMAGE POUR DECOUVRIR LES TEXTES
Les scandales récents concernant le traitement des animaux dans les abattoirs m’incitent à mettre aujourd’hui en ligne un extrait des entretiens que Marguerite Yourcenar a donné en 1980 au journaliste Matthieu Galley.

On appréciera, j’espère, la largeur de vue de la Dame de Mount Desert. Et comme elle s’y montre capable de donner sens à une forme d’habitation du monde  dont il semble que nous nous éloignions chaque jour à grands pas.

Nous avons complété ses propos par un extrait tiré de l’oeuvre de Jean-Christophe Bailly dont nous ne saurions trop recommander sur le sujet, le livre intitulé Le Versant animal.

Et pourquoi ne pas redécouvrir aussi l’extraordinaire ouvrage d’Upton Sinclair, La Jungle (1906), consacré aux célèbres abattoirs de Chicago, un livre dont on dit qu’il amena le Président des Etats-Unis de l’époque, à renoncer à consommer des saucisses à son petit déjeuner !

dimanche 5 février 2017

POUR UNE HYGIÈNE DE L’ESPRIT. UNE PENSÉE SANS ABRI. CHRISTIANE VESCHAMBRE AVEC LES LYCÉENS DE BOULOGNE ET CALAIS.

Christiane Veschambre au lycée Branly de Boulogne-sur-Mer
L’école peut-elle se limiter aujourd’hui à des savoirs arrêtés ? À la transmission de modèles ? De listes. De connaissances ou de dogmes à réciter. Non. Et de moins en moins non ! À l’heure où la menace de l’enfermement des esprits dans des systèmes de croyances visant à nier le droit de chacun à sa propre différence alerte à juste titre sur ce que nous voulons sauver de nos démocraties, il est bon de rappeler que la pensée véritable, celle qui fait avancer, est toujours sans abri.

jeudi 2 février 2017

MERCI À LA REVUE DÉCHARGE !

Cliquer pour consulter la revue

La très riche et attentive revue en ligne Décharge vient de consacrer sous la plume d'un de ses principaux animateurs, le poète Claude Vercey, une intelligente et utile présentation de notre toute récente anthologie de l'auteur bourguignon Pascal Commère.

Merci à elle ! Et réjouissons-nous qu'existent toujours ces fidèles espaces où le travail des poètes est vraiment accueilli dans un esprit d'ouverture qui n'exclut pas le dialogue, éventuellement la critique et l'heureuse simplicité.

mardi 31 janvier 2017

HERBES. CONJOINDRE À NOUVEAU NATURE ET CULTURE ! AUGUSTIN BERQUE.

Herbes sur les bords du lac de Trakkai
On le sait. Durant des lustres, notre enseignement s'est complu  à organiser son approche de la littérature et principalement de la poésie autour de grands thèmes tels l'amour, la rencontre, l'engagement, la femme et plus largement encore celui de la nature !!! Et c'est de cette passion immodérée pour les concepts vagues et leur illustration caricaturale qu'ont fini sans doute par apparaître autour de nous des générations d'esprits manipulateurs et bavards davantage occupés de l'effet de leurs paroles que de la relation qu'elles devraient entretenir avec ce que nous appellerons, pour aller vite, le réel foisonnant qui non pas nous entoure mais de fait, en partie, nous construit. 

Alors, lisant l'ouvrage passionnant que les éditions Champ Vallon viennent de me faire parvenir, un ouvrage collectif consacré au motif de l'herbe et dirigé par un spécialiste du cinéma, le professeur Jean Mottet, je me dis que nous serions bien avisés de renouveler nos approches esthétiques en nous tournant comme il l'écrit vers "l'éprouvante simplicité" comme disait René Char, des motifs élémentaires : le nuage, le rocher, l'arbre, l'herbe…  Pour m'inspirer régulièrement du merveilleux petit livre de Véronique Brindeau sur les mousses, ou de certaines connaissances que j'ai pu recueillir sur la neige, sans parler effectivement de la classification des nuages élaborée par l'anglais  Luke Howard, j'ai pu constater comment cette approche par le motif était en mesure de susciter réellement tout d'abord l'étonnement, puis la curiosité,  la réflexion active enfin, de la plupart des jeunes qu'il m'arrive de rencontrer.

J'aurais aimé ici évoquer chacune des 12 contributions qui à travers le regard du paysagiste, du critique d'art, du philosophe, du géographe, de l'orientaliste, du jardinier, du botaniste, de l'écrivain, du musicologue …. renseignent l'inépuisable réalité de ce qui se trouve recouvert par l'idée en apparence si transparente et docile de l'herbe. La profondeur et l'intérêt si divers de la plupart de ces textes font que chacun comprendra qu'il fera mieux d'aller y voir de lui-même. Je m'attarderai simplement dans ce billet sur la proposition de l'auteur de Poétique de la Terre. Histoire naturelle et histoire humaine, Augustin Berque, qui, partant de l'expérience du philosophe japonais Watsuji Tetsurô (1889-1960)présente à mes yeux le grand mérite non seulement de souligner, ce qu'on sait bien, à savoir, le relativité des cultures, mais celui surtout de nous entraîner à partir de là, à repenser notre relation à la nature qu'il s'agit de retrouver non par un retour à la sauvagerie primitive mais tout à rebours par un lent travail de réciproque reconstruction.

Non, pour Augustin Berque, l'homme ne se conçoit pas comme individu occupant une place centrale dans un environnement conçu comme système interrelationnel d'objets qui lui resteraient extérieurs, mais comme être fondamentalement, constitutivement, engagé dans un milieu qu'il crée à travers les innombrables relations qu'il entretient, tant sur le plan physique que symbolique avec le monde. Ainsi rien ne serait plus faux qu'imaginer, pour parodier la trop célèbre formule de Gertrude Stein, que l'herbe est de l'herbe est de l'herbe et serait partout toujours de l'herbe.  Comme le découvrit  Watsuji Tetsurô lorsqu'il aborda - au printemps ! - la côte de Sicile, l'herbe d'Europe n'a pas comme dans son propre pays soumis, lui au régime plus violent des moussons, ce caractère de brousse impénétrable qui là-bas la fait figurer en bonne place parmi les symboles du wilderness, c'est-à-dire de la nature sauvage. Elle est amène et souple et se laisse aisément dominer. Induisant un rapport particulier de la culture à la nature. Rapport dont la tondeuse à gazon dont nous faisons tant de bruyants et ravageurs usages dans nos jardins comme aux bords des chemins, me semble toujours le très affligeant emblème.

De fait, en faisant du cosmos un univers-objet et en soumettant le vivant à notre mécanique, la science occidentale nous a coupés du monde. Et nous fait vivre chaque jour un peu plus dans un monde de signes et d'abstractions qui certes, nous confère une impression accrue de puissance, mais nous a fait perdre la multiplicité des liens sensibles qui nous attachaient à l'ensemble des réalités élémentaires avec lesquelles s'est tissé au cours des millénaires le milieu qui constitue notre humaine et flexible habitation. Cela, on commence à s'en rendre peut-être un peu tardivement compte, n'est pas sans affecter tant l'équilibre psychique des individus que les grands équilibres naturels dont dépend la survie plus ou moins harmonieuse des sociétés.

C'est pour cela qu'à la manière des calligraphes japonais, qui distinguent 3 degrés successifs d'écriture, il nous appartient sans doute, conclut Berque, après avoir appris à écrire le monde en lui imposant la régularité (zhen) de nos lois, de retrouver une forme d'écriture moins entravée, plus allante (xing) puis de passer à une forme cursive, justement appelée "herbue" (cao), par quoi nous parviendrons peut-être enfin à conjoindre à nouveau cette double dimension de l'être et bien évidemment du monde que sont nature et culture.

Non à partir des idées pures. Mais des réalités sensibles. De l'herbe. Évidemment. 

mardi 24 janvier 2017

PUISSANCE DE LA POÉSIE. APOLLINAIRE ET CHARLOTTE DELBO. AUCUN DE NOUS NE REVIENDRA.


Egon Schiele, La Jeune Fille et la Mort


Oui, amis enseignants. Il pourrait être intéressant à l’école, plutôt que de trop chercher à vouloir découvrir ce que peut bien signifier, en soi, tel poème écrit il y a maintenant des siècles, de réfléchir à la nature de l’écho que des lecteurs actuels, en fonction de leur situation propre, peuvent toujours percevoir en lui.

C’est le 30 ou 31 mars 1902, un dimanche donc ou un lundi de Pâques, jour de résurrection, que Guillaume Apollinaire, pénètre pour la première fois dans l’Alter Nördlicher Friedhof de Munich dont les tombes aux allures parfois inattendues semblent surgir d’un flot de mousses et de verdure. De ce qu’il ressent alors, découvrant - à l’intérieur de ce qu’on appelait autrefois l’obituaire, mot disparu remplacé dans notre franglais d’aujourd’hui par l’expression Funeral Home - une troupe impassible de morts, gentiment préparés et bien allongés dans leur bière et qui semblent l’attendre, on n’en saura rien que la fantaisie qu’après quelques vicissitudes, il intégrera à son recueil Alcools, sous le titre de La Maison des morts.

mardi 3 janvier 2017

EN 2017. L’ÉDUCATION ! POUR LA CONSTRUCTION D’UN AVENIR MEILLEUR, DURABLE ET FRATERNEL.

Tout sépare cette allégorie du feu peinte en 1566 par Arcimboldo qui célèbre la puissance guerrière de l’Empereur Maximilien II de Habsbourg, à l’époque en lutte contre Soliman le Magnifique, du tableau qu’à 14 ans, en pleine guerre mondiale, Giacometti intitula La Paix et qu'on peut découvrir à l’Albertina de Vienne.

Que les enfants qui tiennent ici entre leurs mains, non une colombe blanche mais un merle sans doute - ce qui me fait personnellement penser à l’admirable texte de Fabienne Raphoz sur le merle de son jardin (dont on trouvera un extrait page 30 de notre Dossier Découvreurs 2013) - soient ce que nous avons de plus précieux et que l’avenir que nous leur construisons constitue l’interrogation fondamentale qui devrait nous habiter tous, voilà ce qui pour moi ne souffre plus discussion.

vendredi 30 décembre 2016

JACQUES LÈBRE. L’IMMENSITÉ DU CIEL.


RUISDAEL VUE DE HARLEM  Détail MAURITSHUIS
 « 
père, même pas dans la terre / (il a neigé à gros flocons pendant la crémation) / réduit, désormais, / à l’immensité du ciel. »

Que devient l’être lorsque la vie le quitte et que ce qui l’animait se voit arracher à son enveloppe charnelle ? Qu’y a t’il d’être toujours, autour de nous ? Et quelles limites d’espace, de temps, la conscience peut-être, la parole, le geste, et la mémoire encore, peuvent-ils nous aider – même un peu - à franchir ?

Organisé autour de la disparition de son père, Lucien, (1926-2008), le dernier livre de Jacques Lèbre, demeure tout entier habité par cette forme supérieure et inquiète de sensibilité qui fait d’un certain nombre de moments vécus, le frémissant lieu de passage et l’éphémère réceptacle de tout ce qui, dans la vie et par le monde nous déborde. Éprouve notre vulnérabilité. Réactive le sentiment de l’essentielle porosité de notre être intérieur.

dimanche 11 décembre 2016

RÉACTIVER À CHAQUE INSTANT TOUT LE VIVANT DU MONDE. AUMAILLES, UNE ANTHOLOGIE DE PASCAL COMMÈRE.

CLIQUER DANS L'IMAGE POUR OUVRIR LE DOCUMENT

« Comment aimerais-je être lu ? Je ne sais trop… Sans doute lentement, très lentement. Comme lorsque la voix pressentie la voix du poème — traîne sur les mots, grignotant au passage noisettes quelques voyelles. Certains de ces poèmes saisis dans un effet de ralenti — la vitesse c’est à l’intérieur — en une sorte d’apprivoisement. Sans recueillement ostentatoire d’aucune sorte, en passant. Généralement la poésie appelle une certaine distance, ici le poème semble conjuguer distance et proximité —  j’aimerais dire prochitude —, « lointaine approche » ainsi que le suggérait le titre d’un livre précédent : titre long, ah ce qui ne sait pas finir… Car ces poèmes, comme c’est presque toujours le cas en ce qui me concerne, furent écrits en marchant, ou bien à vélo, c’est-à-dire selon l’allure d’une déambulation. »

C’est par ces mots qu’à notre demande Pascal Commère répondait en 1997 aux élèves du lycée Branly de Boulogne-sur-Mer qui peu de temps après allaient lui décerner le premier prix des Découvreurs.

Nous sommes heureux, quelque 20 ans plus tard, de témoigner de notre fidélité à ce poète qui ne nous a jamais déçu – il en est heureusement de nombreux autres – en publiant avec notre association cette nouvelle anthologie dont nous espérons qu’elle permettra à un nouveau public de découvrir son oeuvre. Une oeuvre dont nous pensons qu’elle pourrait bien, comme nous l’indiquons en quatrième de couverture, « nous aider à reconfigurer autrement l’idée que nous nous faisons de notre importance et de la nature de notre présence, ici, sur cette terre ».


vendredi 9 décembre 2016

LITTÉRATURE ENGAGÉE. UN LIVRE À FAIRE TRAVAILLER DANS LES CLASSES !

Cliquer dans l'image pour accéder à nos extraits


« C’est pas l’affaire privée de quelqu’un, écrire. C’est vraiment se lancer dans une affaire universelle. Que ce soit le roman, ou la philosophie. » Ce n’est certes pas le livre d’Alice Ferney, Le Règne du vivant, qui vient d’être réédité en Poche après sa publication en 2014 aux éditions Actes Sud, qui donne tort au propos que Gilles Deleuze aura tenu dans son Abécédaire, confronté à la lettre A de Animal.

Court, prenant, engagé, le livre d’Alice Ferney qui s’insurge contre l’accaparement et la destruction par les humains de l’espace naturel qu’ils se révèlent incapables de partager vraiment avec toutes les autres formes de vie, mérite d’être proposé aux jeunes qu’il est en mesure de sensibiliser à l’usage que nos sociétés dîtes avancées font du monde dont elles s’estiment toujours, pour reprendre l’expression bien connue de Descartes, « comme maîtres et possesseurs ».

mercredi 7 décembre 2016

OISEAUX RARES.

L'Albatros Louis Joos 2002
illustration pour les Fleurs du Mal de Baudelaire
 « Les oiseaux – entendez les poètes - sont de piètres ornithologues » estime Michèle Métail en réponse à la question que, pour marquer sa naissance, la revue marseillaise BÉBÉ vient de poser à une quinzaine d’auteurs à propos de ce qu’est pour eux la poésie. Que savent-ils en effet, « de l’échancrure d’une queue / des ailes spatulées / du vol sautillant / du bec aplati / du trait sourcilier ? ».

On est en droit de préférer cette frustrante dérobade aux propos malheureusement trop apprêtés de certains dont on voit bien que, modernes albatros, ils ne cherchent en rien à éclairer le lecteur, décidés qu’ils sont avant tout à témoigner de toute la hauteur et de l’envergure de leur vision créatrice. Et sans doute que la poésie crève aujourd’hui de cette contradiction de moins en moins supportable qu’on voit entre la volonté qui s’exprime légitimement chez les poètes de lui voir reconnaître une part plus grande à l’intérieur de la cité et la façon qu’elle a encore chez certains de se composer une langue, de se parer de formes - quand ce n’est pas simplement d’emprunter des postures - accessibles seulement à de rares initiés.

vendredi 2 décembre 2016

IDENTITÉ. ALTÉRITÉ. PLASTICITÉ. COMMENT SORTIR DE SA RAINURE HUMAINE.


MASQUES ALASKIENS,  CHATEAU-MUSEE de BOULOGNE-SUR-MER

*
Je lis toujours avec intérêt les considérations que Florence Trocmé publie dans son flotoir.  Ce qu’elle vient d’écrire récemment au sujet de la traduction et peut-être aussi sur la question de la mise en scène des grandes œuvres littéraires me donne d’ailleurs envie de revenir un peu sur certaine des idées que je défends à l’intérieur de ce blog.

Bien sûr, je partage a priori la considération qu’éprouve Florence Trocmé pour le travail de P. Markowicz et son souci de rendre, avant tout, compte du caractère d’altérité  des oeuvres composées dans des langues étrangères.

Il y a pour chacun, en terme d’élargissement d’être, plus d’avantages à concevoir la traduction comme un chemin vers l’autre qu’à la réduire à n’être qu’une adaptation - à nos communes façons de voir, de penser, de sentir - du système de représentations fondamentalement différent dans lequel s’inscrit toute oeuvre produite dans une culture autre. Rien ne peut être plus triste pour l’homme que de ne savoir pas, comme dirait Francis Ponge, sortir de sa rainure. Et s’empêcher ainsi de se dupliquer constamment lui-même. Je partage à ce sujet les points de vue que développe Marielle Macé dans son dernier ouvrage, qui prenant les choses de manière très large, nous porte à reconnaître, non seulement dans la pluralité des formes prises par la vie humaine, mais aussi dans l’immense variété des existences animales, ce qu’à la suite de Canguilhem elle appelle des allures diverses de la vie, des styles, et va jusqu’à distinguer dans la multiplicité même des objets – je pense en particulier au passage qu’elle consacre aux instruments de musique – autant de manières d’instituer des relations nouvelles avec le monde.

samedi 26 novembre 2016

CHAIRS ET COULEURS DES DÉBUTS DU CHRISTIANISME. LIRE LE ROYAUME D’EMMANUEL CARRÈRE.

FRA ANGELICO Noli me tangere
C’est toujours bien de le redire : nous peinons – le mot est faible – à nous dépêtrer des poncifs qui encombrent notre esprit, nourri de toutes les simplifications, les plus ou moins nécessaires raccourcis qui constituent la base de tout ce qui se collecte d’ordinaire en nous sous le nom de culture.

C’est pourquoi j’ai aimé le livre qu’Emmanuel Carrère a consacré à « enquêter » sur les chrétiens des premiers âges et l’apparition de cet étrange, sinon même insensé système de croyances* qui, né dans cette lointaine partie de l’empire romain qu’était autrefois la Judée, a fini par rayonner sur la plus grande partie du monde donnant au passage naissance aux cathédrales, à la musique de Bach, à la peinture de Rubens, du Caravage ou de Fra Angelico...

Principalement centré sur la figure de Luc, ce grec judaïsé originaire de Macédoine qui fut l’un des principaux compagnons de Paul et auteur comme on le sait de l’Evangile qui porte son nom ainsi que des Actes des Apôtres, le livre de Carrère qui considère en partie Luc comme un confrère en écriture, nous aide à donner chairs et couleurs, un peu d’épaisseur humaine encore, à ces figures que l’ignorance de leur histoire réelle et notre soumission aux images fabriquées, ont laissé se figer en traits grossiers sur les toiles de fond de nos imaginaires. Richement documenté en dépit bien entendu du caractère limité des sources qui nous sont parvenues, l’ouvrage nous aide également à comprendre un peu les circonstances concrètes et les divers enjeux, psychologiques, sociaux, politiques, intellectuels, moraux et pourquoi pas aussi littéraires qui ont conditionné les tout débuts du christianisme et conduit à sa progressive rupture avec le judaïsme.

mardi 15 novembre 2016

EN CHAIR ET EN MOTS. DÉSORDRE DU JOUR D’HENRI DROGUET.

Cliquer dans l'image pour lire le poème


Les éditions Gallimard sortent actuellement le tout dernier livre d’Henri Droguet, Désordre du jour. On sait le bien que je pense des inépuisables chahuts de langue de ce poète charnu, charnel et un brin malicieux, faisant feu de tout bois, que je lis depuis longtemps ... C’est toujours le même régénérant régal. La même solide et robuste empoignade où s’opère une vaste saisie de mondes. La même façon d’accuser le coup. D’être mortel. Et à la fois vivant.

lundi 14 novembre 2016

GRANDE EST LA PATIENCE DE LA PORTE ENTROUVERTE. ARIANE DREYFUS.


Cliquer dans l'image pour lire le texte
« 
Je commence à faire des poèmes quand la partie est perdue » affirmait Cesare Pavese. « J’écris parce que je vais disparaître » nous confie quant à elle Ariane Dreyfus dans le premier vers du poème liminaire de l’ouvrage qu’elle publie aujourd’hui aux éditions Flammarion. Au-delà des différences que l’avisé lecteur ne manquera pas d’établir entre ces 2 déclarations, à plus d’un titre antagonistes, c’est bien là reconnaître qu’un livre de poésie ne peut se réduire à proposer à ses lecteurs une simple promesse de plaisir ou de bonheur, mais qu’il doit également, et sans doute surtout, donner ou redonner, comme l’écrit de son côté le philosophe Paul Audi, « chance à la vie », « la chance pour ainsi dire de prendre de vitesse, à l’endroit même de sa chute, et avant tout effondrement possible, le destin de notre finitude. »

lundi 7 novembre 2016

VULNÉRABLE GÉNÉROSITÉ DE LA POÉSIE. STÉPHANE BOUQUET.

EDUARD OLE PASSENGERS 1929

Merci aux éditions Champ Vallon de m’avoir adressé le dernier livre de Stéphane Bouquet, Vie commune. Ceux qui me font l’amitié depuis quelques années de lire les notes que je consacre aux poètes que j’estime savent tout le bien que je pense de l’œuvre de cet auteur auquel j’ai consacré l’un des tous premiers billets de mon précédent blog (Voir).

L’ouvrage aujourd’hui présenté ne fait pour moi que confirmer l’importance du travail de cet auteur. Importance dont me persuadent moins les nombreux arguments que pourraient avancer ma raison raisonnante ou la sorte d’évidence avec laquelle le lisant, ses livres m’apparaissent sortir vraiment du lot commun. Non, si les livres de Stéphane Bouquet comptent tant à mes yeux c’est qu’ils sont au sens fort émouvants. Qu’ils m’émeuvent. Par tout ce qu’ils réussissent à me faire sentir de ce désir poignant qui nous anime d’une présence élargie aux autres et au monde. Sans rien cacher de tout ce qui pourtant fait la vie moindre et fausse. Et solitude.

vendredi 4 novembre 2016

DE NOTRE POUVOIR DE LAISSER S’ASSÉCHER OU DE FÉCONDER NOS VIES. SUR LE DERNIER LIVRE DE MARIELLE MACÉ, STYLES.


CLIQUER DANS L’IMAGE POUR LIRE NOTRE EXTRAIT DE STYLES








  * 
De quoi, de qui, sommes-nous les serviteurs ? D’un ordre social qui nous gouverne ? Des habitudes que nous avons contractées ? Des pulsions profondes qui inconscientes nous travaillent ? Des mystérieuses chimies de nos cerveaux ? Des langues pourquoi pas encore qui façonnent nos représentations du monde? Les raisons ne manquent pas à ceux qui ne veulent voir en l’homme que la triste, rumineuse et malhabile marionnette de jeux de forces multiples qui l’animent. En même temps l’empêchent. Pour ne lui concéder qu'une illusoire liberté.

Mais, si loin d’être les administrés de vies qui jamais totalement, c’est vrai, ne nous appartiennent, nous étions capables, chacun à notre façon, d’investir les mille et une sollicitations du vivre ; et empruntant parmi les multiples formes qui nous traversent celles qui trouveront matières à s’incarner, se prolonger ou se laisser redéfinir, c’est selon, nous disposions du pouvoir d’affirmer, d’inventer, envers et contre tout, cette singularité d’être que nous refuse un peu vite l’esprit réducteur et conformiste du temps.

Je ne sais si le tout dernier livre de Marielle Macé tranche dans la production universitaire du moment. Je suis loin d’être au fait de tout ce qui se publie aujourd’hui dans ces territoires qui m’ont toujours un peu effrayé, sinon rebuté, par leur caractère de parole souvent étrangement inhabitée. Mais je vois bien que son livre qui s’autorise régulièrement la confidence, est d’un auteur « affecté » par son sujet. D’un auteur qui du coup me concerne. Répondant à certaines questions que, vivant, je me pose. Mettant ainsi ses clartés, ses lumières, sur des choses que je sens.

Et si nous pouvions un peu bricoler comme Sujets véritables, comme buissonnières libertés, ces vies qu’on voit de plus en plus faites pour être  assujetties ?

D’autres, j’imagine, ont rendu compte de son livre. Le replaçant dans le grand concert des productions intellectuelles de l’époque. En soulignant les vues les plus pertinentes, en pointant aussi, c’est certain, les angles morts. J’y ai pour ma part d’abord conforté l’admiration que j’éprouve pour le Michaux de Passages, pour le Barthes de la Préparation du roman ... pour tant d’autres encore à commencer par le Michel de Certeau de l’Invention du quotidien qui, l’un des premiers dans ma bien paresseuse évolution intellectuelle, m’a fait comprendre comment perruquage et braconnage étaient non pas les deux mamelles de notre vie mais deux modes extraordinaires par lesquels nous pouvons un peu bricoler comme Sujets véritables, comme buissonnières libertés, ces vies qu’on voit aussi de plus en plus prêtes à être assujetties.

On reproche aujourd’hui souvent aux colériques leurs excès. À ceux qui ne se retrouvent pas dans les simplifications d’usage, leur élitisme. L’ouvrage de Marielle Macé apportera à ceux-là qui ne sont pas très à l’aise dans le grand corps d’habitudes empruntées de l’univers social actuel, une sorte de légitimation de leurs mauvaises manières. Loin de n’être que pure recherche de distinction, affirmation énergumène ou posture, le souci obstiné de nuances, le refus des connivences ordinaires, comme l’emportement face aux façons de vie jugées insupportables, sont pour Marielle Macé à mettre au crédit de certaines sensibilités qu’elle n’hésite pas à qualifier de poétiques, émanant de dispositions d’être quasi sismographiques capables de repérer mais aussi d’évaluer, les grands mouvements profonds qui affectent les sociétés et menacent par certains de leurs aspects de les rendre en partie inhabitables. C’est ce qu’elle montre à travers les exemples de Baudelaire et aussi de Pasolini dont elle explique qu’il fut celui qui le premier l’ouvrit au désir d’étudier, au-delà des groupes et des individus, les formes particulières prises par la vie. Ses styles. N’en vitupérant celles qu’il voyait émerger de son temps que dans la mesure où elles étouffaient, selon lui, les chances de l’apparaître humain. 


Se délivrer totalement de « l’abcès d’être quelqu’un ? » 

Loin ainsi de nous entraîner à la célébration narcissique des petites différences, pratique malheureusement bien connue de divers milieux poétiques, c’est à partir d’une conception élargie, inquiète et toujours en devenir, du processus d’individuation affectant ce que nous tenons parfois frileusement pour nos identités, que Marielle Macé s’ingénie à valoriser en l’homme cette capacité d’attention qui permet d’éprouver de nouvelles relations avec le monde et de reconnaître autour de soi pour tenter de les comprendre, d’autres compétences de vivre.

Cela ne va bien sûr pas sans problèmes. Car, si, comme l’écrit Michaux, l’attention portée à la foule des propriétés, des façons, qui de partout nous traversent, nous délivre heureusement de « l’abcès d’être quelqu’un », il faut quand même un peu de fermeté pour qu’une forme existe. Et nul ne prétendra voir dans le Léonard Zelig imaginé par Woody Allen  - tour à tour obèse, grec, rabbin, noir, nazi, évêque, jazzman, politicien, pilote d'avion, psychanalyste... et à qui il suffit d'approcher une espèce, une communauté ou une simple personne pour en épouser immédiatement les caractéristiques - la figure idéale d’une individuation parfaitement aboutie.

Non. S’il importe, toujours pour reprendre Michaux, de ne jamais se laisser enfermer dans son style, toutes les formes ne nous conviennent pas. Certaines sont pour nous plus fécondes, entraînantes, que d’autres. D’autres inversement nous seront mortifères. Ou nous ne saurions rien en faire. En fait, nous fait mieux comprendre Marielle Macé, les formes de vie que le monde et sa puissance constante d’invention, de renouvellement, nous propose, ne devraient jamais nous laisser indifférents. Elles réclament au contraire la plus grande ouverture et la plus grande vigilance. Car, comme le dit si bien aujourd’hui le philosophe François Jullien, elles constituent pour nous des ressources. Manière pour chacun, non d’endurcir et d’exalter sa propre identité, mais de tester la plus ou moins grande fécondité, comme dirait Jean-Christophe Bailly, de l’humus particulier sur lequel il fait sa vie.

mercredi 2 novembre 2016

MORT D’UN PERSONNAGE. SUR LAME DE FOND DE MARLÈNE TISSOT.

Mon pere est mort, Dieu en ayt l’ame,
Quant est du corps, il gyst soubz lame…
François VILLON
Le Testament

Je viens de lire le petit livre de Marlène Tissot Lame de fond, produit par La Boucherie littéraire de l'exigeant Antoine Gallardo que je remercie bien de me l’avoir adressé et j’aimerais en dire ici quelques mots qui viendraient rendre justice à l’émouvante et fragile sensibilité de son auteur. À la façon juste aussi qu’elle a de rendre compte de ce que l’idiotie contemporaine appelle le travail du deuil et qui n’est que le jeu millénaire des façons par lesquelles les vivants, comme ils peuvent, s’accommodent de la disparition ou de la perte d’autres qui comptaient, en profondeur, pour eux.

MOTHERWELL DANS LA CHAMBRE D'AMOUR 
Pas nécessaire en fait de savoir si le disparu dont il s’agit dans le livre de Marlène Tissot est son père, son grand-père, quel était son âge véritable ou la place précise qu’il occupait dans la vaste configuration sociale hors de laquelle il est de plus en plus difficile pour chacun de trouver à se définir... Je ne retiens du livre que la possession d’une modeste habitation au bord de la mer vers Cancale, une certaine qualité de lumière insaisissable au bord des yeux, l’odeur tout à la fois âcre et douce d’un vieux pull marin... et surtout cette capacité qui n’est pas seulement de paroles que possèdent certains êtres de nous rendre le monde plus large à habiter (p. 48). «Cours, ma belle ! Nage dans le ciel » [...] Avec toi tout est permis. Avec toi on chahute l’apparence des choses ordinaires, on colorie le monde. Avec toi, je nage dans le ciel, je suis une sirène qui ne craint pas la mer à boire. »

Certes, nous ne manquons pas de livres commandés par les morts1. Et peut-être n’existe-t-il d’ailleurs de vrais livres que ceux-là que nous inspirent la perte et la nécessité encore, non d’en guérir ou d’oublier, mais comme le disait Char, d’en faire l’aliment d’une plus grande capacité d’être. L’ouvrage de Marlène Tissot avec justesse et discrétion en fournit à mes yeux une nouvelle preuve. Lui qui finit par nous faire comprendre qu’on ne réinvente ceux qui manquent qu’en en projetant devant nous la vivante couleur et qui se termine par ces lignes bien belles : « Dans ta cage thoracique, l’oiseau a cessé de chanter. Mais ses ailles palpitent encore en moi. Comme s’il s’apprêtait à m’envoler. Tu m’avais prévenue : « Tout n’est que commencement ». Et aujourd’hui je suis prête à te croire, prête à laisser ta fin devenir un début . »

NOTE :
Parmi les œuvres majeures auxquelles je pense, je ne saurais trop inciter le lecteur à se tourner vers les livres de Frank Venaille et tout particulièrement Hourra les morts ! qui compte en particulier un texte tout à fait extraordinaire évoquant la crémation de son père (voir un commentaire que nous avons jadis réalisé pour des élèves de lycée). Chacun se souviendra également du Pas revoir de Valérie Rouzeau, prix des Découvreurs 2001. Sans oublier, pour rester dans le champ des auteurs pour lesquels nous avons de l’amitié, le beau livre d’Edith Azam Décembre m’a ciguë chez POL ou celui d'Olivier Barbarant,Élégies étranglées dont le commentaire que nous en avons donné il y a quelques années peut largement trouver à s'appliquer à l'ouvrage de Marlène Tissot.

jeudi 13 octobre 2016

LANCEMENT DE NOS RENCONTRES D’AUTEURS.

Laurence Vielle Vincent Granger et Thomas Suel Channel  6-10-2016


C’est avec Laurence Vielle que viennent de débuter les rencontres 2016-2017 que nous organisons autour du Prix des Découvreurs. Plus de 200 élèves du lycée Berthelot de Calais, et du lycée Carnot de Bruay la Buissière accompagnés de leurs enseignants se sont ainsi rendus dans la belle salle du Passager au Channel pour y découvrir celle qui vient d’être sacrée « poète nationale » de Belgique.

Accompagnée du musicien Vincent Granger venu spécialement de Lyon, Laurence Vielle a partagé la scène avec Thomas Suel un habitué de ces rencontres que nous avons toujours plaisir à retrouver.

«Ce qu’on vient d’entendre nous a vraiment redonné la pêche » commentait un jeune de terminales à l’issue du spectacle. «Oui ça nous aide à mieux comprendre le monde et à mieux nous comprendre nous-mêmes » ajoutait l’une de ses camarades toute aussi enthousiaste. Pour Martine Resplandy, organisatrice de cet évènement, « Laurence Vielle et Thomas Suel sont des artistes qui s’intéressent aux gens, qui savent porter un regard critique sur notre époque difficile. Leur travail montre aux jeunes qu’ils ne sont pas seuls et qu’ils ne doivent pas se replier sur eux-mêmes. C’est aussi notre mission à nous professeurs de leur faire rencontrer de telles personnalités à l’énergie communicative ».

Question de style !  Le propre de l’artiste est-il pas, si l’on en croit le tout dernier livre de Marielle Macé, justement intitulé Styles, de mettre son imagination conceptuelle, et sa créativité au service des autres, de « favoriser l’effet retour de cette force » à l’intérieur du collectif, dans l’espérance de permettre à chacun de réviser, d’élargir ou simplement de redynamiser sa manière propre d’être en vie.

jeudi 15 septembre 2016

AUTOUR DE LA GUERRE 14-18. DES RESSOURCES POUR LA CLASSE. UNE BELLE RÉUSSITE ENCORE DU LYCÉE BERTHELOT DE CALAIS.


Nous recevons aujourd’hui,  suite à la commande que nous a passée l’an dernier le lycée Berthelot de Calais, le petit livre que nous avons réalisé autour des paysages de la Grande Guerre. Conçue par Martine Resplandy, professeur de lettres et référente culturelle de l’établissement, l’opération qui a bénéficié de l’aide du Conseil Régional du Nord-Pas-de-Calais et a obtenu le label de la Mission du Centenaire de la guerre 14-18, a conduit une 50 d’élèves de Calais sur les traces de quelques-uns des poètes et artistes du début du XXéme  jetés dans ce qu’on a pu appeler « l’enfer du front ».
  
Accompagnés par 3 écrivains qui se sont efforcés de les aider à mettre des mots sur cette expérience particulièrement difficile, ces élèves ont pu approcher de façon plus significative et profonde des lieux comme le Mémorial de Thiepval dans la Somme, le célèbre Chemin des Dames dans l’Aisne ou encore celui de la Main de Massiges dans la Marne par où passèrent, entre autres, le caporal Cendrars et le sous-lieutenant  Apollinaire. 

Nous donnons ci-dessous à découvrir le PDF de ce petit ouvrage qui témoigne de la qualité que peuvent atteindre les actions menées à l’intérieur d’un établissement scolaire dès lors qu’elles trouvent à s’appuyer sur de véritables compétences et sur des structures animées par une réelle ambition culturelle.

Ceux qui voudraient en savoir plus, voire s’approprier à leur tour de nouvelles ressources, pourront aussi télécharger les importants et très complets documents pédagogiques fournis aux élèves pour préparer leur voyage (cliquer pour cela sur les liens ci-dessous).






vendredi 2 septembre 2016

EXOTEN RAUS !

Musée des Beaux-arts de Tours  et son cèdre du Liban
En cette reprise d’année scolaire il m’a semblé utile de revenir sur un ancien billet paru à l’origine dans POEZIBAO et dont le caractère d’actualité, je pense, n’échappera à personne.

Forêts de combat ! (Kampfwälder). Combien de fois ne s’est-on pas heurté, jusqu’au cœur des situations les plus douces, les plus apparemment bienveillantes à cette «dureté imprévue» qu’évoque dans Paysages urbains, Walter Benjamin comprenant au spectacle de fleurs «serrées en pots contre les vitres des maisons», de certaine petite ville du nord – pensées, résédas – qu’elles représentaient moins « un salut de la nature », «qu’un mur contre l’extérieur». 

Politique, idéologie, la vieille fantasmatique de la défiance et des exaltations imbéciles du moi et de l’identité ravage toujours l’ensemble de notre pitoyable et souvent effrayante économie humaine. Sait-on suffisamment par exemple que les gros concepts de supériorité de la race aryenne et de purification ethnique exposés dans Mein Kampf furent, à l’époque nazie, appliqués rigoureusement aussi au paysage. Destruction des espèces dîtes dégénérées, malades. Proscription des variétés insolites. Des feuillages bigarrés. De toute la gamme des grimpantes, des pendantes, des spiralées ! Bordures composées uniquement d’espèces indigènes droites capables de faire obstacle au virus étranger tout en procurant au peuple le milieu nécessaire à son bien-être physique et spirituel. Autour de 1939, le conflit qui embrase l’Europe n’épargne pas les plantes ! Un groupe d’illustres botanistes soutenu par les plus hautes autorités réclamera «une guerre d’extermination» (Ausrottungskrieg) contre… la balsamine à petites fleurs, cette intruse mongole, venue menacer « la pureté du paysage allemand» !